Des roses pour un poète

      Le fait est que, surnommé « le Rimbaud japonais », Nakahara Chuya (1907-1937) m’a d’abord parlé par son illustre photo. D’elle un livre pourrait être tiré, comme un chant du siècle miné par une ballade interrompue. Fleur du printemps, fleur d’hiver : le gamin de génie n’avait pas plus tôt élevé ses premiers recueils (Enfance, Shonenji ; L’Automne des adieux, Eiketsu no asa), suscité l’admiration de ses pairs, de Oôka Shohei à Kato Shuichi, qu’une méningite l’emporta, aussi rapide qu’une fleur qui meurt à son instant le plus beau. En partant, il légua à une génération bientôt sacrifiée des poèmes d’amour et de mort qu’elle se réciterait en y cherchant des consolations et des consonances à la tristesse de son destin.

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Roses pour le poète

A Nakahara Chuya, mort à trente ans

Sous le chapeau noir de ta mélancolie
Mon petit japonais, petit, petit,
Tes yeux voient ta mort en ton enfant mort
Fumiya petit, petit.
Ton œil droit soulève la mer des poèmes
Ton œil gauche plus sombre que la mort
Porte la souffrance du fils et du père.
Ta bouche à dix-huit ans c’est le silence
Du Japon qui sait l’impermanence,
Et des fleuves qui filent en pleurant,
Le regard du cœur s’y scelle
Pour te sauver t’aimer.

 

  • De Nakahara Chuya, lire : « Poèmes« , traduits du japonais par Yves-Marie Allioux, Editions Philippe Picquier, 2005.
  • On lira aussi l’intéressant article de Kawamura Hatsuho : « L’évolution de la poésie de Nakahara Chuya des années 1920 à 1930 ». Japon Pluriel 8, 2008, p. 157-166.

2 réflexions au sujet de « Des roses pour un poète »

    1. Nakahara Chuya est mort d’une méningite doublée d’une tuberculose, à Kamakura, le 22 octobre 1937. Au début de l’année, il avait connu un internement psychiatrique suite à la mort de son premier enfant, Fumiya (lui aussi, victime d’une tuberculose).

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